Céline - Voyage au bout de la nuit - Extraits - L'Afrique

Publié le 26 Février 2014

 

 

"Les crépuscules dans cet enfer africain se révélaient fameux. On n'y coupait pas. Tragiques chaque fois comme d'énormes assassinats du soleil. Une immense chique. Seulement c'était beaucoup d'admiration pour un seul homme. Le ciel pendant une heure paradait tout giclé d'un bout à l'autre d'écarlate en délire, et puis le vert éclatait au milieu des arbres et montait du sol en traînées tremblantes jusqu'aux premières étoiles. Après ça, le gris reprenait tout l'horizon et puis le rouge encore, mais alors fatigué le rouge et pas pour longtemps. Ça se terminait ainsi. Toutes les couleurs retombaient en lambeaux, avachies sur la forêt comme des oripeaux après la centième. Chaque jour sur les six heures exactement que ça se passait."

 

« … La trique finit par fatiguer celui qui la manie, tandis que l’espoir de devenir puissants et riches dont les blancs sont gavés, ça ne coûte rien, absolument rien.

 

… La négrerie pue sa misère, ses vanités interminables, ses résignations immondes ; en somme tout comme les pauvres de chez nous mais avec plus d’enfants encore et moins de linge sale et moins de vin rouge autour.

 

… Ils passaient ainsi pendant des semaines et des années les uns devant les autres, les colons, jusqu’au moment où ils ne se regardaient même plus tellement ils étaient fatigués de se détester.

 

… Dans l’hébétude des longues siestes paludéennes il fait si chaud que les mouches aussi se reposent.

 

… où le mort du matin n’arrive pas à se refroidir tellement qu’il a chaud encore lui aussi.

 

… Jamais, ou presque, ils ne se demandent le pourquoi les petits, de tout ce qu’ils supportent. Ils se haïssent les uns les autres, ça suffit.

 

… Des mains à ne jamais rien comprendre. Il n’essayait pas d’ailleurs Grappa de comprendre.

 

… Ce serait pourtant pas si bête s’il y avait quelque chose pour distinguer les bons des méchants.

 

… C’est effrayant ce qu’on en a des choses et des gens qui ne bougent plus dans son passé. Les vivants qu’on égare dans les cryptes du temps dorment si bien avec les morts qu’une même ombre les confond déjà. On ne sait plus qui réveiller en vieillissant, les vivants ou les morts.

 

… C’est curieux comme on a du mal à s’affranchir de la terreur des comptes irréguliers. Certainement, je devais tenir cette terreur de ma mère qui m’avait contaminé, avec sa tradition : « On vole un œuf … puis un bœuf et puis on finit par assassiner sa mère. »

 

Ces choses là, on a tous mis bien du mal à s’en débarrasser. On les a apprises trop petit et elles viennent nous terrifier sans recours, plus tard, dans les grands moments. Quelle faiblesse ! On ne peut guère compter pour s’en défaire que sur la force des choses. Heureusement, elle est énorme, la force des choses.

 

… Faire confiance aux hommes c’est déjà se faire tuer un peu."

 

 



Guayasamin est un peintre équatorien (1919 - 1999), qui après avoir visité les camps de la mort et Hiroshima nous donne une vision grave et brutale de l'humanité. DA Picasso - Jacqueline aux fleurs En 1953, Françoise Gilot quitte Picasso. En juin 1954, une nouvelle femme entre dans sa vie, Jacqueline Roque. Il voit en elle une image idéale de la beauté méditerranéenne, celle des paysannes de Gosol qu'il n'a jamais oubliées (et qu'incarnait alors Fernande), celles de Femmes d'Alger de […]

Rédigé par rafael

Publié dans #ART MODERNE

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