Bouguereau - Naissance de Vénus

Publié le 29 Décembre 2013

William Adolphe Bouguereau The Birth of VenusMusée d'Orsay, Paris


le XIXème siècle célèbre la femme dans l'art et la littérature tout en la déclarant mineure dans la vie politique et publique. Ce siècle prône la vertu, la féminité accomplie, mais officialise en même temps la prostitution avec les maisons closes. Le bourgeois d'alors, s'il en a les moyens, peut parfaitement entretenir une femme destinée à son plaisir. Il a donc à sa disposition les deux aspects de la féminité : la fidèle épouse vertueuse pour l'apparence et la courtisane frivole pour l'agrément.

Dans ce cadre, Bouguereau, l'un des maîtres de l'école classqiue expose sans complexe les grands principes qui font la base de la peinture académique. Soulevant de ce fait la polémique.

« Il me faut bien, hélas ! Commencer par l'œuvre de M. Bouguereau. M. Gérôme avait rénové déjà le glacial ivoire de Wilhem Miéris, M. Bouguereau a fait pis. De concert avec M. Cabanel, il a inventé la peinture gazeuse, la pièce soufflée. Ce n'est même plus de la porcelaine, c'est du léché flasque ; c'est je ne sais quoi, quelque chose comme de la chair molle de poulpe. La naissance de Vénus, étalée sur la cimaise d'une salle, est une pauvreté qui n'a pas de nom. La composition est celle de tout le monde. Une femme nue sur une coquille, au centre. Tout autour d'autres femmes s'ébattant dans des poses connues. Les têtes sont banales, ce sont ces sydonies qu'on voit tourner dans la devanture des coiffeurs ; mais ce qui est plus affligeant encore, ce sont les bustes et les jambes. Prenez la Vénus de la tête aux pieds, c'est une baudruche mal gonflée. Ni muscles, ni nerfs, ni sang. Les genoux godent, manquent d'attaches ; c'est par un miracle d'équilibre que cette malheureuse tient debout. Un coup d'épingle dans ce torse et le tout tomberait. La couleur est vile, et vil est le dessin. C'est exécuté comme pour des chromos de boîtes à dragées ; la main a marché seule, faisant l'ondulation du corps machinalement. C'est à hurler de rage quand on songe que ce peintre qui, dans la hiérarchie du médiocre, est maître, est chef d'école, et que cette école, si l'on n'y prend garde, deviendra tout simplement la négation la plus absolue de l'art ! »


« Salon de 1879 » paru dans L'Art moderne.  Joris-Karl Huysmans
 

 

"Prenez une Vénus antique, un corps de femme quelconque dessiné d'après les règles sacrées, et, légèrement, avec une houppe, maquillez ce corps de fard et de poudre de riz ; vous aurez l'idéal de monsieur Cabanel... Voyez au Champ-de-Mars la Naissance de Vénus. La déesse noyée dans un fleuve de lait a l'air d'une délicieuse lorette, non pas en chair et en os, ce serait indécent, mais en une sorte de pâte d'amande blanche et rose. Il y a des gens qui trouvent cette adorable poupée bien dessinée, bien modelée, et qui la déclarent fille plus ou moins bâtarde de la Vénus de Milo : voilà le jugement des personnes graves. Il y a des gens qui s'émerveillent sur le sourire de la poupée, sur ses membres délicats, sur son attitude voluptueuse : voilà le jugement des personnes légères. Et tout est pour le mieux dans le meilleur des tableaux du monde."  Emile Zola, nos peintres au Champ-de-Mars, 1867


"...dans le goût classique, les toiles de M. Cabanel et de M. Bouguereau, le triomphe de la propreté en peinture, des tableaux unis comme une glace, dans lesquels les dames peuvent se coiffer." (Emile Zola, le salon de 1875)

 

Rédigé par rafael

Publié dans #ECLECTISME XIXe

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